Une journée “café philo” avec Mélissa Plavis, ou comment repartir plus riche de questions à la fin de la journée qu’à son début ?

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À l’Atelier des Possibles, nous avons eu samedi 3 mars dernier la joie d’accueillir Mélissa Plavis, auteure de Apprendre par soi-même, avec les autres, dans le monde, l’expérience du unschooling, doctorante en anthropologie, mère… et je vais m’arrêter là pour ne pas dès le départ l’enfermer dans des concepts alors que le thème de la journée de travail semblait plutôt porter sur la déconstruction des étiquettes…

Mais quand même, les étiquettes, c’est utile ! Comme le dit si bien Thomas d’Ansembourg, “définir, c’est finir. C’est accepter la finitude”. Alors je continue à définir. Nous étions une trentaine, parents, non-parents, petits enfants, grands enfants, prof, non-prof et tant d’autres à être venus partager ce moment d’échange autour de deux grands thèmes :

Les Apprentissages autonomes sont-ils suffisants ?

 

L’enfant, mon égal ?

 

Deux belles questions auxquelles, bien évidemment, nous ne sommes pas arrivés à répondre. Mais ce n’était pas le but. Le but était de prendre un temps pour réfléchir ensemble, échanger sur des expériences, s’ouvrir à la différence, relativiser et si possible, sortir de sa zone de confort dans la rencontre avec des idées et points de vue nouveaux.

Alors, dans un souci d’apporter une réponse à ces deux questions, je vais quand même faire la folie de m’appuyer sur des paroles de participant.e.s et ainsi essayer de donner un rendu aussi objectif que possible pour résumer en deux temps trois mouvements les deux ateliers de la journée.

Donc, les apprentissages autonomes sont-ils suffisants ?

Et bien, d’après X., “on apprend tous, tout le temps, malgré nous et quoi que l’on fasse, on apprend”.

Et d’après Y., “Ce qui est, est par essence suffisant”.

Et d’après Z., “En tant que parents, la seule chose qu’on peut faire c’est de ne pas les empêcher de faire ce qu’ils (ndlr : les enfants) veulent faire.”

La réflexion a, à un moment, pris la direction de la question du fameux “art de ne rien faire” de Greenberg ou du “non faire”. Car il est vite apparu que la question des apprentissages autonomes était étroitement liée à la notion de dominant/dominé dans l’enseignement. Sur cette question Mélissa a parlé de la subtile limite entre le non-faire et le non-interventionnisme.

Ne rien faire ce n’est pas être passif ni être dans un interventionnisme superficiel et à intention pédagogique. Le non-faire, c’est faire, mais par enthousiasme personnel et envie profonde et authentique de partager avec l’autre une passion ou un intérêt, et non de lui proposer, tout en se forçant, un champ d’expérience qui n’est pas la conséquence d’un enthousiasme personnel. (Pour plus d’info sur l’importance de l’enthousiasme dans le processus d’apprentissage, voir le TEDTalk de Sir Ken Robinson sur “comment l’école tue la créativité”). Autrement dit – et pour reprendre ce qui a été dit par une participante :  “en tant que parent, la seule chose que l’on peut faire c’est de ne pas les empêcher de faire ce qu’ils veulent faire” et je rajouterais, de ne pas se forcer à faire ce que l’on ne veut pas faire, même si l’activité en question est une demande de l’enfant.

Nous avons cheminé, au fil des détours, sur la question de la suffisance des apprentissages autonomes.

Et à une participante de conclure la matinée de travail sur la question qui tue : “Les apprentissages autonomes sont-ils suffisants…oui mais suffisants pour quoi ? Et pour qui ?” Ainsi interpellant le groupe à se demander si, au fond, ce n’était pas la question fondamentale.

Puis repu après la pause de midi ( pendant laquelle certain.e ont échangé sur l’éternelle question : les jeux vidéo, diable ou Saint-Esprit !?… to be continued 🙂 ) nous sommes passés au second thème :

L’enfant, mon égal ?

Ok Patrick (parce qu’à l’Atelier des Possibles, on a mieux que google, on a Patrick !), c’est quoi un enfant ? “Enfant vient du latin infans qui signifie qui ne parle pas”. (Finalement, définir n’est pas si mal, ça pose le décor…)

Nous avons donc cherché à identifier ce qu’était un enfant et ce qu’était un adulte.

Et quelles sont les caractéristiques qui les définissent et les divisent ? Puis, nous avons fait un travail de déconstruction des projections que l’on pouvait avoir sur ces deux groupes de personnes pour en arriver à la conclusion qu’en fait, ça dépend…

Est-ce qu’un enfant est un être innocent ? Joyeux ? Plus libre (que l’adulte) ? Moins fort (physiquement) ? Immature ? Est-ce que la différence entre adulte et enfant est uniquement juridique : L’adulte est responsable de l’enfant aux yeux de la loi, l’enfant est irresponsable ? Est-ce que la fin de l’enfance se définit par la maturité sexuelle ? Est-ce que quiconque a des droits sur les enfants,… sur les adultes ? Mais au fait, c’est quoi un enfant, c’est quoi un adulte ? Est-ce quiconque a des droits sur qui que ce soit ? Est-ce qu’un enfant, c’est quelqu’un qui a moins d’expérience ? Mais moins que qui ? Est-ce que c’est quelqu’un de dépendant ? Mais de quoi ou de qui ? Dépendant comment ? un peu, beaucoup, passionnément… ?

La quantité de point d’interrogation dans le paragraphe précédent est révélatrice. À chaque fois que l’on se disait : un enfant, c’est cela, il y avait toujours un contre-exemple. Il a émergé l’idée que, peut-être, nous serions tous à la foi adulte ET enfant et que la limite entre les deux “dépend, et dépasse”. Voire même qu’il y aurait en chacun de nous un enfant, un adulte et un parent, selon la théorie de l’Analyse Transactionnelle.

Conclusion de la journée 

Chacun.e est venu(e) aux ateliers avec son expérience, ses connaissances et son envie de partage et on a chacun.e appris quelque chose, par nous même, avec les autres, dans le monde.

Noémie